RETROSPECTIVE #3: Psikyo (彩京)
Historique, 1992-2003
Psikyo fut fondé en 1992 à Kyoto par des anciens de Video Systems, plus précisément Shin Nakamura et l'équipe de développement à l'origine de Sonic Wings. Insatisfait de la décision du studio de développer sur MVS, ce qui les auraient obligés à faire un STG horizontal, il décidèrent donc de fonder leurs propre studio. Ainsi naquit Psikyo sur les bases d'une équipe qui avait réussi à produire un STG extrêmement populaire à l'époque au Japon (le magazine Game Machine classant la borne de Sonic Wings la deuxième plus populaire de l'année 92).
L'objectif de base au démarrage de Psikyo était plutôt simple, le staff venait de réaliser un excellent STG alors autant continuer sur cette lancée et faire ce qu'ils savaient faire de mieux, soit le STG vertical qu'on leur refusait! A cette période le marché de l'arcade prend de plein fouet la folie Street Fighter 2 et connait une modification significative de son orientation. Le versus fighting devient le genre à la mode, et les shooters qui étaient jusque là un genre phare vont connaitre une perte de popularité assez marquée. Les grosses entreprises vont modifier leurs plans pour s'adapter mais des studios phares spécialisés dans le genre vont disparaitre, comme par exemple Toaplan. C'est un moment charnière pour le genre puisque c'est aussi lors de ces années que vont naitre de nouveaux studios spécialisés qui vont amenés aussi une nouvelle génération de STG. Bien sur Psikyo est de ceux là, mais je pense bien évidement aussi à Cave ou Raizing. Le genre va se radicaliser au fur et à mesure des années et devenir une niche pour joueur hardcore jusqu'à l’avènement du genre Danmaku qui va finir de le marginaliser définitivement et l'éloigner des yeux du grand public.
Mais en 1992 nous n'en sommes pas encore là, et Psikyo va lancer son premier jeu intitulé Sengoku Ace en appliquant des bases de game design que l'on retrouvera tout au long de la vie du studio, et dont on trouvait déjà les prémices dans Sonic Wings.
A savoir une volonté d'accessibilité, afin que les débutants comme les joueurs aguerris puissent prendre du plaisir, grâce à une idée toute simple. La première moitié du jeu est plutôt facile et les niveaux ne sont pas toujours les mêmes permettant une rejouabilité. Par contre la deuxième moitié du jeu est beaucoup plus complexe avec des niveaux figés et obligent à connaitre les patterns pour s'en sortir.
Cela nous amène au deuxième principe, le design n'est plus dédié aux réflexes purs mais comprend aussi la nécessité de mémoriser les déplacements et les patterns de tirs. Ces derniers sont d'ailleurs une spécificité appelé 彩京弾 (Psikyo dan) que l'on peut traduire par les balles de Psikyo, qui est la marque de fabrique du développeur. Le principe est simple dans son idée, les patterns mélangent des rideaux de boulettes pairs et impairs avec des vitesses différentes, des vagues lentes auxquels se mêlent des tirs très rapides. Le résultat pour le joueur est qu'il est quasiment impossible de se contenter d'esquiver par réflexe mais qu'il est bien plus efficace de mémoriser le déroulé pour adapter ses déplacements.
Enfin le design et particulièrement le character design est très soigné, avec des personnages nombreux et charismatique. Psikyo fera appel à des illustrateurs célèbres pour ses productions avec à la clé des identités très fortes sur chacun des jeux. Alors qu'habituellement le vaisseau ou le véhicule est mis à l'honneur dans les shooters, ce sont cette fois les pilotes qui sont au centre des projecteurs.
On retrouve ces caractéristiques dans la très grande majorité des jeux Psikyo et l'amalgame de ces différents points leurs donne leurs identité si spécifique qui va faire la renommée du studio. La très grande majorité de la production sera spécifiquement développé pour l'Arcade avant d'être adapté sur les consoles de l'époque. Mais c'est cette volonté de préserver sa spécificité qui va précipiter la perte de Psikyo. Le marché de l'arcade rentrant dans une crise de plus en plus profonde et les shooters devenant de moins en moins populaires, les sources de revenus devinrent de plus en plus compliqué. Et la stratégie commerciale concentré sur l'arcade va se révéler non concluante. Les tentatives de diversification, par du développement pour du Pachinko par exemple, ne sera pas suffisante.
En proie à des difficultés financières au début des années 2000 après moins de dix années d'existence, Psikyo est racheté par une société dénommé X-nauts en 2002, on apprend sur le wikipédia japonais que les présidents des eux compagnies étaient des connaissance. La marque Psikyo va continuer a être utilisé pendant quelques années encore mais le studio de développement de Kyoto est clos en 2003 et les équipes sont transférées directement chez X-nauts.
Historique, l'après 2003
La suite est beaucoup moins reluisante, mais très intéressante. X-nauts avait précédemment racheté les droits d'utilisation de Masaya, la marque d'édition de NCS. En possession de deux très beaux catalogues, X-nauts va en commencer l'exploitation en multipliant les adaptations sur PS2 par le biais de compilation. L’accueil des fans est extrêmement négatif tant le travail est bâclé. Le coup de grâce est donné en 2005 avec la sortie sur PSP de Sengoku Cannon, le troisième épisode de la série, qui hors du chara-design est un shooter de bien piètre qualité!
C'est cette même année 2005 que ce qui reste du staff provenant de Psikyo est définitivement mis à la porte, X-nauts ne conservant plus que la marque. Mais les choses deviennent encore plus nébuleuse par la suite. Le catalogue Masaya est transféré vers une autre entité nommé Extreme, dirigé par le même patron que X-nauts alors que le catalogue Psikyo part vers une compagnie nommée ZeroDiv appartenant à Takayuki Haragami. Il était un des développeurs de Psikyo mais si mes recherches sur le web japonais sont exacts il semble avoir joué un rôle trouble et contribuer à la déliquescence du développeur. En 2009 sort le portage de Striker 1945 + sur PSP, encore une fois bâclée avant quelque années de sommeil. A partir de 2016, les portages reprennent sur le store Switch, ainsi que sur smartphone.
La dernière péripétie date de 2019, avec le rachat de ZeroDiv et donc du catalogue Psikyo par City Connection à Gung-Ho qui avait apparemment pris le contrôle de ZeroDiv entre temps (sans que cela ne soit très clair). City Connection avait précédemment racheté le catalogue de Jaleco, c'est encore un de ces "charognard" qui exploite des gloires passées en ressortant encore et toujours les mêmes jeux dans des compilations sur console, ou encore des versions smartphones blindées de pubs.
Près de 20 ans après sa disparition, Psikyo continue tout de même à vivre, et aussi à faire vivre des éditeurs plus ou moins scrupuleux. Mais si après tant de temps, les productions du studio de Kyoto continue à avoir un certain succès c'est aussi la preuve de la qualité des jeux et de l'appréciation dont ils ont pu jouir.
Ludothèque
Psikyo était principalement connu pour ses shooters en arcade, ainsi que (au Japon) pour sa série de jeux de mah-jong érotique Taisen Hot Gimmick. Faisons un tour d'horizon de ses productions les plus marquantes.
La série des Sengoku Aces
Elle comprend trois épisodes, deux sortis en arcade et un troisième sur PSP réalisé par X-nauts. Evacuons immédiatement cet épisode qui n'a en commun avec les deux premiers que le nom et les personnages, et qui s'est révélé un bien mauvais shooter avec une réalisation indigne. La série se caractérise par son background d'inspiration historique japonaise mais très marqué par un coté fantastique/steam punk qui donne un coté comique plutôt original. C'est aussi l'apparition d'un personnage emblématique, la prêtresse Koyori. Le premier épisode en 1993 est aussi le premier jeu de la toute jeune société, c'est un shooter vertical qui outre son design est très proche de Sonic Wings. Le deuxième épisode est sorti en 1996 et il s'agit cette fois d'un des rares shooters horizontales réalisés par Psikyo.
Sengoku Ace |
Sengoku Blade |
Sengoku Cannon |
La série des Gunbird
Deux épisodes composent cette excellente série de shooter, sorti respectivement en 94 et 98. Le design est encore une fois de grande qualité, dans la lignée de ce que propose la série des Sengoku Aces mais cette fois dans un univers purement fantastique et toujours matinée de steam punk. Le coté comique est cette fois très accentué grâce aux personnages rigolos que l'on contrôle mais surtout grâce au trio de méchant débile qui font beaucoup pensé aux protagonistes ennemis de Nadia ou le secret de l'eau bleu. La 2D de chacun des épisodes et superbe et mets bien en valeur le coté "Kawaii" du design. Les deux sont cette fois-ci en scrolling vertical et le gameplay ne s'éloigne pas vraiment des habitudes du studio, solide et efficace. Un épisode spin off nommé Gunbarich, qui est une sorte de croisement entre un puzzle game et un shooter est sorti en arcade en 2001, il n'est pas très connu mais c'est un excellent jeu.
Gunbird |
Gunbird 2 |
Gunbarich |
La série des Strikers 1945
Une série populaire de Psikyo qui compte 4 épisodes. Les trois premiers sont sortis en arcade en 95, 97 et 99. Il s'agit de shooter vertical qui reprennent un thème militaire classique et qui ressemble à la série des Sonic Wings mais avec un background plus sérieux. Le titre rappelle également la célèbre série de Capcom. C'est la série qui est surement la moins original de Psikyo mais aussi une des plus solide en terme de qualité de gameplay. Le quatrième volet est en fait un remake du deuxième épisode sorti en 1999. Il vient de façon assez ironique boucler la boucle de l'histoire de Psikyo puisqu'il s'agit d'une adaptation sur MVS, un peu moins de 7 ans après avoir quitté Video Systems par refus de développer sur le système de SNK. Il s'agit quand même d'un shooter vertical malgré un écran qui n'est pas adapté.
Striker 1945 |
Striker 1945 II |
Striker 1945 III |
Striker 1945 Plus |
La série des Zero Gunner
Deux shooters en 3D qui sont originaux dans la production Psikyo a plus d'un titre. Le premier sorti en 97 est d'abord le premier jeu en 3D développé par le studio. Il s'agit également pour l'occasion d'une réalisation effectué sur une carte Model 2 de Sega, alors que Psikyo utilise un hardware propriétaire. Le deuxième épisode sorti en 2001 utilise lui le Sega Naomi. Le design est cette fois très sérieux, je dirais presque réaliste si ce n'est l'utilisation de robot en tout genre mais aucune place pour l'humour est la fantaisie. Enfin le gameplay profite du fait que l'on pilote un hélicoptère pour proposer un système ingénieux permettant de locker le tir et de pivoter autour d'un point fixe. Cela permet d'avoir un champ de tir sur 360 degrés. Les deux titres sont de belles réussites en arcade.
Zero Gunner |
Zero Gunner 2 |
La série des Taisen Hot Gimmick
Que dire sur cette série! Il s'agit tout d'abord de jeux de mahjong tout ce qu'il y a de plus classique dans le gameplay ou la réalisation. Le point fort, ou du moins différenciant, c'est bien entendu le coté érotique puisqu'il s'agit en fait de strip mahjong! Psikyo fait appel à ces illustrateurs indépendants habituels pour le chara design, et compte tenu de la grande qualité de leur travail on peut comprendre que les fans ait été au rendez-vous. Un des cotés très sympa de la série c'est aussi d'avoir des personnages de leurs autres séries en guest cachés, bien sur féminin mais aussi masculin. Le battle mode a aussi grandement aidé au succés de la série où ce sont les personnages masculins qui s'affrontent de façon comique. Toute la patte Psikyo est présente dans ces jeux. C'est une série qui n'a bien sur jamais quitté le sol japonais.
Taisen Hot Gimmick Kairakuten |
Sol Divide
Un des rare shooter horizontale de Psikyo, qui n'a pas connu un grand succès mais qui est un jeu très intéressant. Le gameplay est original, puisque le combat au corp à corp est essentiel, accompagné d'une magie limité permettant de réaliser des tirs à distances. Il mélange le shooter, le beat them up et une petite dose de RPG, ce qui fait un mélange très étrange et qui n'a pas forcément trouvé son public. Le design est par contre à tomber, le monde heroic fantasy crée pour l'occasion et de toute beauté et le travail de Katsuya Terada est tout bonnement fantastique.
Sol Divide |
Gunspike
C'est un shooters multi directionnels 3D publié par Capcom en arcade en 2000. Totalement en 3D, il ressemble à des jeux comme Commando ou Smash TV avec une orientation plus orienté sur le combat de boss. C'est un jeu fun et intense qui a connu un succès correct en arcade. Les personnages jouables proviennent d'autres titres emblématiques de Capcom, on retrouve par exemple Cammy de Street Fighter, Bulleta de Darkstalkers ou encore Rockman.
Gunspike |
Dragon Blaze
Shooter vertical en 2D sorti en 2000, encore une réussite commerciale en arcade pour Psikyo (mais au vu de la suite surement pas assez rentable) il s'agit de ce qui se rapproche le plus d'un danmaku dans la production du studio. Un petit bijou qui jouit comme toujours chez Psikyo d'une superbe direction artistique et qui est malheureusement assez méconnu hors du Japon. Les différentes compilations permettent de rejouer à cet excellent shooter.
Dragon Blaze |
La majorité de ces jeux se retrouve assez facilement dans les diverses compilations sortis sur une ribambelle de console. Je déconseille fortement les versions smartphones, déjà je n'aime pas la maniabilité tactile mais en plus ces applis sont blindées de pubs et ne rendent pas honneur à la qualité de ces productions. La dernière compilation en date sur Switch proposé par City Connection semble enfin faire honneur à Psikyo, en proposant du contenu additionnel de qualité. Si vous deviez n'en choisir qu'un, il me semble qu'il s'agit de la bonne pioche.
C'est la fin de ce petit tour d'horizon sur Psikyo, en une petite dizaine d'année ce studio aura produit beaucoup d'excellents STG et laissé sa marque sur le paysage de l'arcade. Malheureusement la période n'était pas propice à ce type de production et il n'aura pas survécu au début des années 2000. Les portages se succèdent depuis près de 15 ans bénéficiant à des éditeurs qui fructifient l’achat de portefeuille entier de marque sans forcément toujours apporter une plus value quelconque à leur sortie.
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